Coronavirus : le point sur les droits des salariés

La crise économique et sanitaire du Covid-19 amène de profonds bouleversements dans la vie des entreprises et de leurs salariés, sur un plan économique mais aussi juridique.

Les mesures prises pour faire face à cette crise sans précédent impactent fortement le droit du travail. Elles sont précisées dans une ordonnance publiée au JO le 26 mars 2020 en application de la loi d’urgence sanitaire.

L’occasion pour le Journal du Manager de faire le point sur les droits des salariés en cette période d’épidémie.

Le financement de la formation professionnelle des salariés

Les entreprises peuvent se faire rembourser 100 % des formations pour leurs salariés pendant leur période d’activité partielle. Il suffit qu’elles en fassent la demande auprès de la Dirrecte.

Ce dispositif, mis en place à partir du 14 avril, consiste en un assouplissement des critères du Fonds national de l’Emploi. Le FNE-formation permet depuis 2008 d’aider les salariés les plus exposés à conserver leur emploi. Ce dispositif présentait toutefois une condition : que le salarié n’ait pas été placé au chômage partiel.

Face à l’ampleur de la crise du Covid-19, le Ministère du Travail a décidé de supprimer cette condition. Tout salarié en activité partielle peut désormais bénéficier de ce dispositif. Il reste quelques cas d’exclusion, tels que les apprentis ou les adultes en contrat de professionnalisation.

Le dispositif vise en outre tout type de formation, à l’exception des formations obligatoires. La durée de la formation ne peut cependant pas dépasser la période d’activité partielle. En outre, les dossiers présentant un montant supérieur à 1 500 euros feront l’objet d’un examen plus approfondi.

La demande de prise en charge doit être adressée par l’employeur aux Dirrecte, les relais opérationnels du Ministère du travail.

Les congés payés et RTT des salariés en période de confinement

Il est possible d’imposer à ses salariés de prendre des congés payés et des RTT.

S’agissant des congés payés, cela se limite à 6 jours ouvrables (soit une semaine de congés payés), en respectant un jour minimum de prévenance. Par comparaison, le délai de prévenance est en temps normal d’un mois, sauf délai contraire prévu par un accord collectif.

Autre condition : qu’un accord collectif d’entreprise, ou à défaut, de branche prévoit ces congés payés « forcés ».

L’employeur peut aussi, toujours sous réserve d’un accord, fractionner des congés payés sans l’accord du salarié. Il peut également suspendre temporairement le droit à un congé simultané des conjoints ou des partenaires de PACS travaillant dans la même entreprise.

L’entreprise peut également imposer à ses salariés de prendre des RTT, sans leur accord, dans la limite de 10 jours ouvrables. Les salariés doivent alors être prévenus un jour franc à l’avance.

Les salariés mis en chômage partiel continuent en outre d’acquérir des congés payés. La totalité des heures chômées est prise en compte pour le calcul de l’acquisition des droits à congés payés.

Si une semaine de congés payés intervient pendant la période de chômage partiel, ce sont les congés payés qui prévalent. Le salarié reçoit donc une indemnité de congés payés – soit un maintien intégral du salaire – et non l’indemnité de chômage partiel.

La situation des salariés en chômage partiel

La mise en chômage partiel

Le décret du 25 mars 2020 autorise l’employeur à mettre en chômage partiel ses salariés avant même de prévenir la Direccte. C’est un aménagement en cette période de crise du Covid-19, puisqu’en temps normal un accord préalable est obligatoire avant toute mise au chômage technique des salariés.

L’entreprise dispose de 30 jours à partir de la date de mise en activité partielle pour demander l’autorisation à la Dirrecte. Celle-ci accepte la demande dans un délai de 48 heures. À défaut, la demande est considérée comme tacitement acceptée.

L’employeur peut tout à fait choisir un fonctionnement « par roulement », en mettant ses salariés au chômage partiel à tour de rôle par jour ou par semaine.

À noter que les cadres en forfait jours peuvent eux aussi être mis en activité partielle. C’est une autre nouveauté du décret du 25 mars 2020.

La rémunération des salariés en chômage partiel

Les salariés placés au chômage partiel reçoivent 70 % de leur salaire brut, ce qui équivaut à 84 % de leur salaire net. Attention, l’indemnité de chômage partiel est calculée sur 35 heures hebdomadaires. Les heures supplémentaires – qui ne peuvent logiquement pas être effectuées – ne sont pas prises en compte.

Cette règle ne s’applique pas si le calcul précédent conduit à leur verser un salaire inférieur au SMIC. L’entreprise doit verser a minima le montant du SMIC à ses salariés.

L’entreprise sera ensuite remboursée en intégralité par le versement d’une allocation d’activité partielle. Celui-ci est cependant limitée à 4,5 fois le SMIC.

L’activité des salariés en chômage partiel

L’employeur n’a pas le droit de demander à ses salariés en chômage partiel total de travailler pour l’entreprise.

Une exception : si le chômage partiel consiste en une réduction de la durée hebdomadaire du travail, le salarié est autorisé à continuer partiellement son activité.

L’employeur qui continuerait à faire travailler ses salariés en chômage partiel total risquerait de devoir rembourser intégralement les sommes perçues au titre du chômage partiel.

En outre, il encourrait une interdiction de bénéficier, pendant une durée maximale de 5 ans, d’aides publiques en matière d’emploi ou de formation professionnelles. Enfin, il risquerait également 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.

Pour en savoir plus à ce sujet, nous vous invitons à consulter notre article consacré au chômage partiel.

Covid-19 : le droit de retrait des salariés

Le droit de retrait permet à un salarié qui se sent en danger de cesser son travail. Selon le Code du Travail, la situation de travail doit présenter un danger « grave et imminent pour sa vie ou sa santé ».

Le droit de retrait des salariés est juridiquement encadré et ne peut être utilisé à tort et à travers.

La propagation et la dangerosité du coronavirus inquiètent de nombreux salariés, contraints d’aller travailler. Cependant, selon le gouvernement, cette justification n’est pas valable si l’employeur a mis en place les dispositions prévues par le Code du travail. Le salarié doit avoir une réelle proximité avec le risque.

Les entreprises doivent respecter les gestes barrières et les faire appliquer. Si c’est le cas, le ministère du Travail considère qu’elles respectent leurs obligations en matière de santé.

Dans le cas contraire, le salarié peut contester la défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection. Il peut cesser son travail – en conservant sa rémunération – le temps que l’entreprise prenne les mesures nécessaires.

Les salariés abusant de leur droit de rétractation encourent des sanctions pouvant aller jusqu’à leur licenciement.

Le licenciement en période de coronavirus

Licencier un salarié parce qu’il n’y a pas assez de travail dans l’entreprise ne constitue pas un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Si l’entreprise subit une période significative de son chiffre d’affaires, elle pourra peut-être envisager le licenciement économique.

Il en va de même pour la rupture du contrat de travail pendant la période d’essai. Si celle-ci survient pendant la crise du Covid-19, elle pourrait être considérée comme abusive par un Conseil des Prud’Hommes.

Il est préférable dans ce cas de mettre ce salarié en activité partielle. Cela a pour effet de suspendre la période d’essai.

Le sort des élections des représentants du personnel

L’ordonnance du 1er avril suspend les élections professionnelles. Cela signifie que tous les processus électoraux qui étaient en cours dans les entreprises avant la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance sont interrompus.

Cette suspension prend effet à compter du 12 mars et s’éteindra 3 mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Pour rappel, l’état d’urgence sanitaire prendra en principe fin le 24 mai 2020. Les élections professionnelles sont donc interrompues jusqu’au 24 août 2020 au moins. Ce délai pourrait s’allonger encore davantage en cas de prorogation de l’état d’urgence.

La mesure impacte également l’ensemble des délais du processus électoral. Par exemple, l’information du personnel de l’organisation des élections professionnelles, ou encore l’organisation du second tour.

Sont également suspendus les délais dans lesquels le juge judiciaire et l’autorité administrative doivent être saisis d’éventuelles contestations.

L’actualité évoluant très rapidement ces jours-ci, cet article sera progressivement mis à jour au gré des annonces du gouvernement et nouveautés législatives.

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